Oligarshiiit sort ce lundi 25 novembre le maxi Démerde-toi, véritable prélude à leur deuxième album, L’opus des iii (06-01-14). L’occasion pour ReapHit de s’attarder sur les Oligarques à travers une chronique, une interview et un jeu-concours. Du boom, du bap et du cœur. Rencontre avec trois MC’s hyperactifs dans leur(s) passion(s) depuis une dizaine d’années : Enz, Tedji et Doods, qui forment le triptyque d’Oligarshiiit, un point pour chaque.
Les 3 Royaumes, votre premier album sorti en octobre 2012, a d’abord été présenté sous forme de 3 EP’s, avec des titres de chacun. Effet de teasing ou volonté de présentation des trois univers des différents membres ?
Enz : On avait tous fait des projets solo, le groupe était en train de se créer, donc le but était de dire aux gens qui nous connaissaient individuellement qu’on avait un projet commun.
Doods : L’idée est venue quand on a trouvé le titre de l’album, Les Trois Royaumes. Il fallait présenter chaque royaume avant la réunification. Chacun a eu carte blanche pour la tracklist de son EP.
Tedji : Comme on avait l’habitude de faire des morceaux en solo (généralement de 3 couplets, comme il se doit), quand on s’est retrouvés en groupe, à n’avoir qu’un couplet à écrire par tête, et ben ça nous a semblé super facile et, du coup, on a fait plein de morceaux. On a eu le même (faux) problème sur le prochain album d’ailleurs. Enfin, sauf Doods…
Du coup, les EP’s étaient aussi l’occase de sortir les left over qui n’ont pas pu figurer sur l’album pour diverses raisons. (Une spéciale au passage pour tous les beatmakers qui perdent leurs pistes d’instru. Bande de bâtards.)
C’était aussi pour faire la transition entre vos parcours solo et Oligarshiiit. D’ailleurs, pouvez vous nous rappeler vos parcours ?
Doods : Pour ma part, je rappe depuis 15 ans environs, j’ai sorti mon premier projet solo, Stay Focus en 2009, j’ai un autre groupe avec Tedji, 2 autres rappeurs et 4 musiciens avec qui on fait surtout de la scène. Et j’ai fait un album en duo avec Tedji : DoodéTed In Full Effect.
Tedji : En ce qui concerne ma gueule, je tourne depuis près de 10 ans avec un groupe qui s’appelle Und’Chaque, dans lequel je rappe accompagné de 5 très bons musiciens de jazz. J’ai aussi rappé longtemps avec mon pote Belush avec qui je forme le duo Blazbro. Il y a aussi La taQtiQ du Toast (4 rappeurs et 4 musiciens) que je partage avec Doods. Tous ces groupes sont un peu au point mort en ce moment vu qu’Oligarshiiit me prend, pour mon plus grand plaisir, pas mal de temps.
Sinon, j’ai sorti en mon nom la trilogie Radio Snouze qui est une série de compils de morceaux solos et de collaborations diverses. Et puis je suis régulièrement sur scène avec des gens qu’ont rien à voir avec le rap : un groupe de folk irlandaise, des chanteurs limite variétoche… Ça fait du bien.
Enz : De mon coté, j’ai sorti mon premier maxi en 2005 One Love, puis mon album Ma Boutiqueen 2007. Après ça, j’ai fait un album avec mon groupe Ed&Enz et un album avec Blumonk. En 2011 j’ai sorti une compilation de mes titres inédits sur laquelle apparaît pour la première fois sur disque Oligarshiiit.
D’où ça vient, d’ailleurs, Oligarshiiit ? On devine le sheeeeiiiit de Clay Davis (The Wire), mais le reste ?
Enz : J’avais envie qu’il y ait Oligarchie dans le nom du groupe. C’était un peu ça l’idée de départ, un genre de réunion au sommet.
Tedji : Après, dans les échanges de mails, «Oligarshit » est sorti. On a ajouté les i pour chaque rappeur. On était à fond dans The Wire à ce moment-là (J’avais même sorti un EP dédié à la série avec BlazbrO quelques années avant, dans lequel on reprenait le générique et tout…)
Avoir chacun vos précédentes expériences personnelles a été un atout pour la scène, ça vous a aidé à construire une plus grande cohérence scénique ?
Doods : Oui.
Tedji : C’est sympa de ta part de parler de cohérence scénique.
Enz : Clairement, c’est sur scène que l’esprit de groupe est né. On a vraiment pris du plaisir à partager les scènes. Ça nous changeait de nos autres projets, plus cérébraux. La cohérence s’est faite un peu comme par magie. Parfois ça marche, tu ne sais pas pourquoi. C’est un peu ce qu’il s’est passé.
J’imagine que défendre un premier projet sur scène, titre après titre, ça fait pas mal réfléchir quant à l’orientation du deuxième.
Tedji : Ça donne envie d’en faire un deuxième, déjà !
Est-ce que ces concerts ont eu une influence sur votre façon d’écrire ?
Enz : Bien sûr. Déjà, le show a pas mal évolué entre le début et la fin du tour. Au début, on avait des morceaux solos dans le set. Aujourd’hui, il n y a que du Oligarshiiit.
Tedji : Pour les prochaines dates, on va essayer de garder un «best of» des premiers concerts et présenter tous les morceaux du deuxième album qui ont été vraiment pensés pour la scène.
Vous sortez un maxi-vinyle en cette fin d’année. Ça devient plutôt rare ceux qui sortent des maxis, comme à l’époque. Pure nostalgie, ou volonté de créer un objet rare, cadeau aux supporters ?
Tedji : Avant de bosser avec DJ Skandal, qui est aujourd’hui le 4e « i » d’Oligarshiiit, on a tourné avec une demi-douzaine de DJ (big up Jim, Prophet, Téhu, Qiwu…). Même à l’heure du serato , on sait que c’est encore important pour pas mal de gens d’avoir des «vrais» vinyles. C’était pour nous l’occase de rendre hommage aux tourneurs de table autour de nous. Et puis, pas mal de gens nous l’ont demandé. Enz avait déjà produit de belles galettes noires. Pour ma part, j’étais déjà apparu sur des vinyles d’autres groupes, mais c’est le premier que je co-produis. Grosse fierté.
Ce maxi annoncera l’album « L’Opus des iii » (le nom défonce), à paraître début d’année 2014, pour la fêtes des rois. Vous nous en parlez un peu ?
Tedji : Merci. C’est un album qui va peut-être surprendre notre base de boom-bapeurs, mais on s’est bien marrés à le faire. Contrairement au premier qu’on avait enregistré et mixé vraiment à l’arrache, on a tenté de faire les choses bien. Après les maquettes en home studio on a tout ré-enregistré dans un chouette studio du 95. On a délégué le mix à Supafuh et le mastering à Blanka. Autant te dire que c’est pas un équipe de bras cassés. Il y aura aussi une bonne place laissée aux platines de DJ Skandal (voir la vidéo de l’interlude sortie ce mercredi).
Enz : On y retrouvera des prods de Supafuh, Oldy Clap Recordz, Tayreeb, Tu m’soul, Kreapton, MRC, … Surtout des gens qui n’étaient pas là sur le premier album en fait.
Doods : Il y a quand même Ydekan, James Digger et Stanza qu’étaient là sur le premier.
Opus des iii, sortie à la fête des rois, la communication est originale et réfléchie. C’est important aujourd’hui de se démarquer par ces petits détails qui accrochent le public ?
Tedji : Breaking news ! Finalement, la distrib’ nous a prévenu que l’album ne pourrait pas sortir pour l’épiphanie comme prévu parce que, apparemment, les vendeurs de la Fnac sont en gueule de bois à cette période. Du coup, il arrivera un tout petit peu plus tard. Mais on va quand même lâcher quelques surprises le jour de la fête des rois.
Enz : Cependant, on trouvera une nouvelle date qu’on mettra en cohérence avec le titre de l’album, ou dans tous les cas, on travaillera et on travaille déjà la promo dans ce sens. C’est super important d’avoir des concepts, des idées, pour être visible car on n’a pas de gros moyens. On se sert de nos cerveaux.
Suivra un autre projet, Oligarfeat, dont on devine la teneur (des feats), à paraître au printemps, mais ce sera avec qui ? Et pourquoi ces deux projets à intervalle si rapprochée ? Il y avait déjà du monde sur Les 3 Royaumes.
Tedji : Tous les morceaux ont été enregistrés en même temps que ceux de l’Opus des iii. En fait, on a lancé un paquet de morceaux en se disant que tous ne se feront pas, rapport au rap français, et puis au final, ils se sont quasiment tous finalisés ! Du coup, on s’est retrouvé avec une trentaine de morceaux pour la tracklist de l’album. De là est venue l’idée de le scinder en deux. Du coup, on retrouve assez peu de feats sur l’Opus des iii.
Enz : De toutes façons, vu la liste d’invités sur les trois royaumes, niveau feat, on a déjà bien donné.
Doods : En vrac on peut annoncer : Pepso, Kickblast, Phases Cachées, Yo.k, K.Oni, Belush et Zen, Ozédo, Dézuets d’plingrés… Il y a encore quelques trucs en cours…
Tedji : DJ Skandal mixera tout le disque dans l’esprit des tapes qu’il sortait il y a une petite dizaine d’années. Vous vous rappelez les tapes de Skandal à l’époque ? Ben c’était bien.
Vous êtes des mecs de live, vous avez souvent joué avec des formations acoustiques… Pour vous, qu’apportent les instruments de plus que de simples platines ?
Tedji : On a tous eu des projets avec des musiciens. C’est quelque chose qu’on sait et qu’on aime faire. Les avantages sont nombreux : On entend mieux les textes, on peut se permettre plus de choses scéniquement et on peut choper des p’tites meufs qui sont fans de Jeff Buckley. Et puis, le truc triste mais tellement vrai : Ça rassure les programmateurs qui se disent « Ahhh, des vrais instruments ! » Les cons…
Enz : En revanche, l’idée ce n’est pas d’abandonner les platines, on adore ça. On voudrait vraiment développer les deux formules. L’avantage c’est que ça n’a pas été trop long à mettre en place, vu qu’on avait déjà l’habitude de tenir la scène à trois. Mais ce qui est un peu dérangeant avec les musiciens, c’est que beaucoup de rappeurs ne voient leur légitimité sur scène qu’avec des musiciens. Le DJ est un musicien, et dans nos concerts avec deux platines et 3 micros on fait de la VRAIE musique.
Doods : Big up à Mauricio Santana (guitariste) qui nous a déjà souvent accompagné sur scène avant même l’idée du projet Oligarcoustiiique. Sans lui, on n’aurait pas forcément eu envie de faire le pas dans ce cadre-là.
Vous avez également participé en 2013 au Buzz Booster Île-de-France. Comment ça s’est passé ? Faim de scènes, désir de se montrer ?
Enz : On s’était déjà inscrits l’année dernière mais on a des dates qui sont tombées à Montréal en même temps donc le choix a été vite fait.
Tedji : Des gens nous ont conseillé de le faire. Ça tombait pas mal avec la fin de l’enregistrement de l’album et avant la sortie du maxi. C’était l’occas’ de tester 2/3 trucs et de se confronter à des professionnels de ce merveilleux monde de la musique. C’était une bonne expérience même si ça m’a fait halluciner le côté « bétail » quand il y a 10 groupes dans la même soirée. Y’a aussi eu des trucs un peu limites au niveau de l’organisation… Bref, on est trop vieux pour ces conneries.
Doods : Tu dis ça parce qu’on a perdu ? On a passé les quarts de finale à Mains d’œuvres et on fait les demis au centre FGO. C’était cool parce qu’il y avait plein de potes dans les autres groupes (Phases cachées, Dirty Zoo, Lemdi & Moax…) Bravo à Phases Cachées, Aladoum et Luidji qui passent en finale.
Participer à un tremplin musical lorsque l’on a déjà 2 albums à son actif, ce n’est pas un pari dangereux ?
Tedji : Oh bah non. C’est pas comme si les gens en avaient quelque chose à foutre en vrai. Si ça avait été les Rap Contenders, j’dis pas. Quoique… J’suis sûr que Doods serait ultra-violent aux RC.
Enz : Et puis y’a le côté concours, mais il y a aussi le côté concert. Des gens qui viennent voir d’autres groupes peuvent te découvrir là et commencer à s’intéresser à ton projet. C’est pas dégueu pour la visibilité.
Vos coups de cœur du moment ?
Tedji : J’suis en train de lire tous les bouquins de Ken Bruen et j’kiffe ma race. Sinon, j’viens de finir Le Bloc, un roman d’anticipation qui décrit la France d’une union gouvernementale FN-UMP. Flippant. En BD, la série Doggy Bag du label 619. Et puis en son, j’écoute surtout les copains : Pepso, Kickblast, I2C, K.Oni & RezO, Keep On de Mess, ou vous pouvez retrouver tous les oligarques, sauf moi (Mess, bâtard.), Le projet Ferré, ce Rap (lire notre chronique ici) de Trublion et Supafuh. J’attends aussi de pieds fermes le projet de L’Asile (les copains de Rain City avec qui on partage la scène de l’International le 29 novembre pour la release party du maxi) qui s’annonce comme super bien.
Enz : Le clip de Miley Cyrus, « Wrecking Ball », mais sans le son. Je ne suis pas trop BD, mais j’ai découvert MUTAFUKAZ du même label 619, c’est vraiment bon. J’aime bien Nathalie Portman. Musicalement, Marco Polo avec Organized Konfusion m’a rendu ouf, et puis Eminem et Duck Down. Et les projet des copains, y’a donc les albums de Mess, Clem Beat’z, Olivier Orange, K.Oni & RezO, Loréa (qui sort le 5 décembre) et les EP’s de Trait d’Union et de Diaspo Camp. Si vous jetez une oreille à tous ces projets, vous vous rendrez compte de la démesure de mon ego.
Doods : En ce moment, Mess et Lomepal. Sinon, j’reste bloqué sur Evidence…
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