L’époque a beau être trouble et particulièrement propice à la revendication, les rappeurs sont les grands absents de ce mouvement social. Alors que tous il y a peu se sentaient subversifs, rares sont ceux qui aujourd’hui font écho aux idées de la place de la République où à la grogne des rues de France. Terrorisme, censure, corruption, suppression des acquis sociaux, état d’urgence, nos indignations quotidiennes semblent pourtant être un terreau fertile aux écrits dissidents.
Par peur de l’assimilation sans doute, et des retombés médiatiques incertaines d’un mouvement « non-banlieusard », les rappeurs les plus engagés se sont presque tous éclipsés, lorsqu’il a fallu s’exprimer. Mais ce trou béant créé par le mutisme de ceux que l’on souhaitait entendre a laissé le chant libre à ceux que parfois, l’on souhaiterait faire taire.
Et après d’innombrable vidéos Youtube et freestyle-webcam anti 49-3, une intervention inutile mais sincère de Nekfeu à Nuit Debout, un freestyle de Guizmo à la limite du malaise, (et un très sympathique « VLV » de L.O.A.S il faut l’avouer), Keny Arkana, éternelle agitée de son Etat, s’est dit qu’il était temps. Oui, temps de renfiler le sarouel et les gants et de revenir fièrement enfoncer quelques portes ouvertes.
A travers les 6 titres de son EP, la marseillaise se fait comme souvent chroniqueuse de ses indignations, et entre cris d’alarme et chants d’espoir, s’offre un rapide tour d’horizon de la situation. Sans se réinventer le moins du monde, l’artiste ne semble pas une fois encore mettre la priorité sur la musique mais bien sur la cause qu’elle sert. L’engagement est peut être sincère, et le fond fidèle à la militante et ce que l’on en connait, mais le manque d’originalité des productions et l’absence presque totale de démarche artistique cohérente suffit vite à nous horripiler.
Etat d’Urgence n’en reste pas moins du Keny Arkana pur jus, même si l’on aurait pu espérer de l’artiste une démarche artistique et une force de proposition plus poussée, au vu du thème de l’EP. Et non de se contenter de la réalisation de la simple bande son d’un discours social trop évident. A diffuser lors des prochaines manifestations.
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