Prhyme, Dernier Souffle des Studios D&D

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Après 25 ans de bons et loyaux services, le fameux studio D&D aka the HeadQCourtez a fermé ses portes en ce mois de janvier 2015. Plus qu’un simple studio, cet endroit mythique fait partie de l’histoire du hip-hop, et sa fermeture est un symbole de plus qui disparaît, au même titre que la démolition en 2013 du Five Pointz dans le Queens, qui fut le temple de la culture graffiti new-yorkaise. L’aventure D&D, c’est bien plus que le QG de DJ Premier, longtemps vu comme un aboutissement pour tout MC qui souhaitait enregistrer son album dans des conditions optimales. Le studio a vu passer les plus grands noms, de Rakim à NaS en passant forcément par Gangstarr.

Mais le D&D, c’était aussi la symbolique du rap underground de par son environnement extérieur dans les années 90 : pour s’y rendre, c’était une plongée dans un univers à base de deal de coke et de règlements de compte, y foutre les pieds, c’était s’assurer une certaine street crédibilité genre survivor. 25 ans d’activité donc, qui ont commencé avec l’enregistrement du troisième et inusable album des Gangstarr, Daily Operation et qui se termine en 2014 avec un dernier album du nom de PRhyme le fameux opus collaboratif entre Royce Da 5’9 et DJ Premier, on s’attendait donc à un final explosif pour ce duo qui a pas mal de fois fonctionné par le passé.

Les deals de crystal meth et les drive by shooting sont depuis bien loin, la ré-ubarnisation lancée sous l’air Giuliani et l’arrivée d’une masse de hipsters en slim et chemise de bûcheron a commencé à faire brûler le prix du mètre carré et rendre le truc un peu trop bio. De là à dire que c’était mieux avant, on évitera, mais disons que l’atmosphère générale autour du HeadQCounterz s’est assez pink floydisé pour faire fuir pimps et autres drug dealers. Ce côté un peu flower power et vegan de baltringues, on le retrouve depuis quelque temps chez Primo, même si le mec reste avant tout street vrai, cela fait un moment qu’il tourne en rond et ne soulève plus trop les foules même si l’homme garde une aura qui lui permet de compter sur une fan base complètement aveugle à sa baisse de niveau. Au-dessus, niveau adoration, c’est directement la case RZA et Jay Dee.

Primo fait du Primo, mais sans effet et sans magie. C’est mieux que de faire de la merde, certes, mais il faut remonter à 2009 pour retrouver le beatmaker capable de nous baffer les oreilles avec violence (The Blaqprint de Blaq Poet, un street album qui sent vraiment l’urine de métro) et l’année 2014 fut bien fade, voire insipide dans sa vingtaine de beats lâchés. On pouvait donc se dire que le garnement gardait le meilleur pour son dernier album produit dans l’anthologique D&D Studio. Si on avait le droit de rêver, la réalité, elle, est bien plus cruelle comme à son habitude, et le résultat très loin d’atteindre ce que l’on pouvait espérer.

On va calmer tout de suite les rageux : oui, les productions de l’album sont bien meilleures que les productions lâchées depuis trois ans, mais non, elles n’ont rien d’extraordinaires ni même de mémorables. On retiendra surtout que DJ Premier sait écouter ses fans et revenir à sa formule de base. Sauf que cette fameuse cuisine, ça fait plus de 25 ans qu’il nous la ressort et qu’au final, l’élément de surprise est complètement absent. Une production donc qui se résume à un cadeau pour les fanatiques du gars, ceux qui ne jurent que par lui. Pour les autres, la déconvenue est claire et nette. On pourrait mettre l’accent sur le fait que Primo se soit borné à sampler dans l’univers d’Adrian Younge mais cela n’enlève pas le constat qu’à part la première partie de l’album, c’est-à-dire « Dat Sound Good » , « You Should Know » , « Courtesy » et « Phryme » ça vole vraiment très bas…

On en a donc un peu la larme à l’œil, car derrière les productions, on avait aussi l’attente d’un Royce 5’9 en forme sur un projet concret. L’homme connu pour être un des meilleurs kickers de la scène actuelle a malheureusement aussi l’habitude d’être une très grosse feignasse quand son taux d’alcoolémie dans le sang avoisine les 5g. Que ce soit en solo comme sur Success Is Certain ou avec son groupe Slaughterhouse, on avait le droit à un récital de rimes complètement anarchique qui frôlait le foutage de gueule en général. PRhyme était donc l’occasion de revenir poser avec des textes structurés et percutants. Chose que l’on ne pourra pas renier sur cet opus, Royce repart à un meilleur niveau, même si l’on reste très loin de ses premiers solos.

Le vrai point noir de cet album sur le mceeing, c’est les guests, on se demande ce qu’ils apportent de plus à part leur nom. La secte des fanatiques de Jay Electronica crieront surement au bûcher, mais à la rigueur, Schoolboy Q marque plus sur « Undergroundz Kings » que le Jay sur « To Me, To You » . Le reste des feats essaient de rendre la pareille au natif de la Motor Town, il n’y a pas de tâches à soulever, mais pas non plus de moments incroyables.

PRhyme aurait pu être le dernier grand coup d’éclat des studios D&D, on y a tous cru, mais au final, ce mini album restera à la rigueur un bon moment, sans réel replay value dans les années à venir. On ne peut pas en vouloir à Royce qui fait le travail et qui a démontré que l’on pouvait conjuguer cirrhose du foie et delivery de qualité. Et si on sent un certain effort du côté de Primo, le constat aux manettes reste plutôt moyen. Le D&D se meurt donc avec ce dernier album, et on se dit quelque part que cette mort peut être aussi un nouveau départ dans un nouvel environnement pour Primo, surtout que l’homme est déjà dans les tablettes pour produire entièrement de gros projets attendus dès 2015 : Nas, M.O.P.Big Daddy KaneKrs-One et NYGZ (on y croit encore). Des poids lourds donc, où il faudra bien plus que la recette délivrée sur ce PRhyme pour nous épater.

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