Nemo Nebbia, il se peut que ce nom ne dise rien à beaucoup… Et pourtant, le bougre n’en est pas à ses premières armes dans le rap. Membre du groupe La Moza, auteur du très bon albumMozaïste, le rappeur a décidé de tenter l’aventure cette fois-ci en solo. Et c’est avec un premier clip très réussi du titre « Hors du temps« que Nemo Nebbia revient, amenant avec lui un projet 6 titres solidement construit.
Si le titre « Hors du temps« m’avait laissé présager un très bon projet, c’est par « Enième lune« que j’aimerais commencer. En effet si le morceau est placé en deuxième sur la tracklist, il fait pour moi véritablement bien office d’intro, et annonce la couleur de l’EP.
Sur une boucle à l’ambiance mystérieuse comme une lune jaune cachée par les nuages, une batterie entraînante, une voix hésitante se fait entendre… et Nemo Nebbia y répond en mettant les points sur les i.
A travers des métaphores et comparaisons envoûtantes, entre la mer et la nuit, entre le blues et l’angoisse, le rappeur y raconte son parcours, son état d’esprit, et sa vie évoluant lune après lune. Et si l’étiquette de «rap conscient» a encore un sens, Nemo Nebbia tient à faire savoir qu’il n’en fait surement pas partie, sa vie et son ressenti étant au centre de ses textes.
Cet effort textuel se fera ressentir tout au long de l’album, avec une vraie recherche en termes d’images et de figures de style, le rappeur y construit véritablement son propre univers. Et musicalement, l’album n’en est pas moins en reste : extrêmement bien produit par Raistlin, les ambiances hypnotiques et planantes sont à l’image du titre de l’album, consolidée par des arrangements et variations bien placés.
En écho à cette ambiance musicale, Nemo Nebbia nous sort un flow bien rythmé lui-même porteur d’une certaine ambiance, productions et flow s’adaptent parfaitement l’un à l’autre, témoin de l’alchimie entre le rappeur et le beatmaker.
Le meilleur exemple ? Le titre « Hors du temps« ! Une ligne de basse envoûtante, sorte de piano mystique, Nemo Nebbia nous amène des bouts de vie piochés ici et là dans la brume de ses pensées. Une vraie réussite.
Sur « Tête chercheuse« , les sonorités plus légères flirtent avec un refrain plus grave. La dynamique de la batterie et la basse bien présente ajoutent de la profondeur à l’instrumentale. Encore une fois instru et flow se marient à merveille, avec un Nemo Nebbia technique, dont la voix semble teintée d’ironie et de sarcasme, nous laissant nous balader entre le cheminement de ses idées.
La track suivante nous plonge dans l’ambiance contraire, avec une boucle plus sombre, mystique, entrecoupée de passages à la guitare à l’ambiance étrange. Et c’est ce décor musical que Nemo Nebbia a choisi pour parler de son rapport à l’écriture. Un morceau intéressant notamment grâce à sa structure et ses variations, et à son ambiance particulière.
« Aucune évidence » est le titre qui m’a le moins accroché. En effet, si la combinaison de nombreuses sonorités est intéressante, je trouve que le séquençage saccadé des samples de l’instrumentale lui enlève de la dynamique. Pourtant en s’attardant sur ce titre, l’ambiance colle bien avec la prestation de Nemo Nebbia, notamment au niveau du texte qui démonte les évidences de la vie avec une certaine… évidence. Les mots disséminés de façon lente et lourde, il en ressort du morceau un caractère implacable, comme si certaines choses étaient immuables.
Après ces cinq titres singuliers, l’album se clôture sur « Hélium« , et on ne pouvait espérer mieux comme outro.
Nappe sombre, quelques notes de piano mélancoliques, batterie lointaine, l’instrumentale se fait discrète et met à merveille le MC sur le devant de la scène. Nemo Nebbia rappe ici comme il rapperait pour son dernier son, avec l’envie de lâcher tout ce qu’il a à dire, variant son flow à mesure que le morceau défile. Sur ce titre, il nous invite à venir lui dire adieu pendant qu’il prépare ses bagages, prêt à partir n’importe où, tant que c’est loin d’ici. Peut-être le morceau où l’alchimie entre MC et beatmaker se ressent le plus.
Vous l’aurez compris, nous avons ici 6 titres solidement réalisés. Toutefois, un bémol s’impose : l’uniformité de l’EP.
En effet, même si les titres sont de qualité, on regrette la trop grande homogénéité des ambiances et l’absence de thèmes aux morceaux.
Quoi qu’il en soit, Nemo Nebbia, pour sa première escapade en solo, nous livre ici une galette de qualité, musicalement travaillée, tout en étant dans la continuité de ce qu’il faisait auparavant. En somme, un EP cohérent possédant sa propre identité, un petit quelque chose bien à lui.
En écoute, et en téléchargement légal ci-dessous :
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