J-5 avant Agartha, retour sur la Megadose Vald

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A quelques jours de la sortie du très adroitement teasé Agartha, retour sur les deux premiers extraits clippés.

Après le succès critique et public de son EP NQNT 2, Vald dévoilait il y a quelques semaines « Eurotrap », extrait de son premier album Agartha qui sort ce vendredi 20 janvier, dont le clip avait été tourné sur fond vert afin de permettre aux internautes d’y incruster ce qu’ils voulaient et d’en proposer ainsi leur propre version.

Le rappeur d’Aulnay-sous-Bois (93) nous en livre un second extrait, moins bouncy mais tout aussi trap, et sans doute meilleur encore : « Megadose » produit par Seezy, à l’occasion duquel il invite à sa table les frelots Suikon Blaze AD, Dj Weedim (tous deux présents sur le projet), Biffty, Julius et Keukeu pour une gargantuesque orgie de junk food façon La Grande Bouffe. La réalisation du clip est signée Kub Cristo.

Toujours aussi désabusé, Vald pique au vif par le constat glacial qu’il nous invite à dresser avec lui sur l’état du monde (« Avant qu’explose la Terre, la stratégie j’expose… »). Au cours de ce sordide banquet où les convives se bâfrent jusqu’à l’écœurement, sourds au message du rappeur pourtant diffusé sur les écrans de télé tout autour d’eux, ce dernier dénonce les excès et dérives d’un capitalisme en perte accélérée d’humanité, entre chaleureuse exploitation salariale (« Le marché nous a baisé / J’regarde les frères se faire rabaisser / Pour un salaire se faire enlaisser / Fermer sa gueule, ne faire qu’encaisser / S’empresser d’s’engraisser sans précédent… »), surconsommation (« Mutation amorcée, j‘suis déjà à un stade avancé / Je ne suis qu’une créature des multinationales sous rafale cadencée » / « Je m’ souviens lorsque j’ secouais mon hochet, j’avais pas tous ces besoins d’phacochère ! » / « Le chemin du McDo indiqué, pour le reste on va pas t’aiguiller »), mort du service public et mort cérébrale ( « Ravale ta pensée, Tout le monde le fait pour toi, tu n’as plus qu’à danser » / « Megadose vide mon regard quand je pense beaucoup ») trouvant leur symptôme commun dans la télé réalité ( « A chaque pause, megadose, mais je zappe ; ni je matte ni la une, ni la dos, ni la tres » ), hiérarchisation de l’information selon la loi du « mort-kilomètre » (« La chatte de ta mère la Bretonne est plus importante que celles de 100 Maliennes / Qui gère les coefficients ? ») et hérésie de la politique extérieure américaine (« Pour la hagra, pas de week-end ! / La guerre pour la paix ? Yes We Can ! / Les larmes et le sang essuyés… »).

En somme, il décrit avec sa froideur habituelle les varices violacées d’un monde obèse, gavées et à jamais dilatées par sa quête inapaisable de pouvoir et d’argent. Un monde prêt sans hésitation à vendre son âme en pièces détachées, dont il diagnostique avec une inquiétante et acide lucidité le taux de mauvais cholestérol. Un monde enfin qui dans une logique consumériste se refermant implacablement sur elle-même, semble condamner à l’usage de produits stupéfiants pour s’en évader… ou au contraire pour pouvoir continuer à s’y confronter (« Le cœur est morose, et seul le lean est rose » / « Nos addictions sont manigancées / La frustration est alimentée » / « On t’crée la névrose pour que t’augmentes la dose » / La plupart du temps, j’en ai rien à foutre de dénoncer / « Je n’veux que m’défoncer, rechercher la montée / Pour ne pas m’lamenter. Avant d’être millionnaire / À esclave ou iencli j’suis apparenté » / « Fuck si tu perds la tête, tant que tu payes ta dose »).

A l’arrivée, « Megadose » traduit l’overdose de son auteur à l’égard d’un système dégénérescent dont la machinerie infernale s’acharne à pousser l’humanité dans ses retranchements jusqu’à l’absurde. Un système dont les maîtres mots sont, aujourd’hui plus que jamais, l’asservissement, le profit et l’oppression. Il semble donc bien qu’on tienne là notre premier banger de trap consciente.

Vald sera à l’Olympia de Paris le 17 mars prochain, et en tournée dans toute la France à partir de début mars.

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