« Entretien avec un empire ». Un concept basé sur une interview improvisée avec une personnalité dite « old-timer » du rap français. Pas de questions préparées à l’avance, ni de contraintes de temps. Les échanges sont spontanés et directs, comme ils le seraient lors d’une discussion entre deux potes sur la terrasse d’un café.
Aujourd’hui, je rends visite à Eben, la moitié des 2 NEG’. Du hip-hop français, il a tout connu et est connu de tous. La vie mouvementée, parfois tourmentée d’un enfant de la « street » et une longévité exceptionnelle, lui permettent de revenir sur une carrière complète et atypique. L’artiste bientôt quarantenaire, se livre de façon naturelle et raconte sa vie, son parcours, riche en références et autres anecdotes authentiques . Un récit peu banal, captivant et parfois émouvant, mêlant sincérité et passion pour le son.
Interview réalisée sur la base d’une conversation entre Eben et Maj Trafyk.
Eben ! Par quoi commencer ? Raconte-moi déjà comment te vient cette passion pour le rap ?
En fait c’est simple, à l’époque j’écoutais Radio Star avec Dj LBR, il y a très très longtemps, et je suis tombé sur Johnny Go et Destroy Man qui avaient fait un passage là bas, je me souviens qu’il y avait Phil Barney aussi …
Donc là on est en plein dans les années 80. Quelle année exactement ?
J’peux pas te donner les dates exactes, mais c’est plus vers la fin des années 80, peut-être 86, 87… Et coté rap américain, ça a commencé vraiment avec les Fat Boys. Ils étaient trois balaises, ils faisaient du beatbox, moi j’kiffais. J’ai adhéré tout de suite. Run DMC avec « Mary Mary » et tout, c’était mon époque aussi. Mais ça a vraiment commencé avec les artistes soul comme les Jackson Five, ces gens-là ont ramené un style musical que personne ne connaissait.
Tu avais quel âge à cette époque ?
J’avais 14 ans, j’étais au lycée Marcel Deprez sur Bastille, que j’ai d’ailleurs quitté, car je voulais rapper à Radio Nova. Le dimanche soir, j’attendais que mes parents s’endorment et j’me barrais en douce à l’émission de Lionel D et Dee Nasty. J’ai croisé beaucoup de monde là-bas, Solaar, EJM, Moda & Dan etc… Y’avais aussi des Niçois qui étaient très bons, mais je ne me souviens pas de leurs noms… Et donc un jour j’ai rappé dans l’émission.
C’était ton premier texte ?
Ouais, un texte bien pourri d’ailleurs…(rires)
On peut dire que c’est en écoutant Radio Nova que tu as commencé à gratter en fait ?
Oui, en écoutant Radio Star et Radio Nova, mais il y avait d’autres émissions, d’ailleurs beaucoup de gens ne le savent pas, mais j’ai animé une émission sur Radio Beur avec Alibi Montana… Il y a très longtemps…
Comment les choses évoluent pour toi ensuite ? Je sais que tu as fait un passage aux Antilles, notamment en Guadeloupe… D’ailleurs, tu es d’origine guadeloupéenne, du côté de ta mère c’est ça ?
Oui, effectivement, je suis parti vers l’âge de 18 ans, en fait l’histoire est un peu compliquée donc je vais la synthétiser. Je cherchais ma voie, je voulais être tagueur, graffeur, DJ, donc j’ai acheté le matériel nécessaire, genre feutres Posca, bombes, platines, etc…
Un jour, j’ai reçu un papier de l’armée pour le service militaire que je devais faire en Allemagne. J’ai regardé ma mère, et j’ai décidé de vendre mes platines et le reste de mon matos pour partir en Guadeloupe. Je n’ai plus revu ma daronne pendant trois ans. J’avais un oncle qui vivait sur place, il était musicien, et quand il venait sur Paris, il habitait chez nous.
Ma mère lui avait demandé si je pouvais aller chez lui si un jour l’occasion se présentait. Il a dit oui, mais quand j’ai débarqué, il était choqué… J’avais abandonné ma mère, mon père et mon frère. Donc je suis resté chez lui quelques temps, mais il était particulier. Il jouait de la basse à 4 heures du matin, j’ai pas supporté…
Ensuite, j’ai tout fait pour enchaîner et rencontrer des gens qui bossaient en radio. J’ai commencé à rapper et ai monté un groupe aux Antilles qui s’appelait FDP avec Baby Bronx et plein d’autres. J’ai également monté mon émission à Radio Eclair située à Basse-Terre, l’émission s’appelait Rap Eclair . Ensuite, j’ai bossé à K.Danse Fm sur Pointe-à-Pitre avec Dj Kandia, on avait une émission très réputée en Guadeloupe, que l’on animait tout les deux et on y recevait tous les artistes.
Donc là on était au début des années 90, tu restes 3 ans aux Antilles.
Juste, je précise que sur ces 3 ans aux Antilles, c’est là que j’ai commencé à être le plus actif, j’ai vraiment fait beaucoup de choses là-bas, et beaucoup de rencontres. Notamment un personnage fabuleux : East.
J’ai rencontré également Massita la sœur de DJ Kandia. J’ai créé un autre collectif, le Black is Back Posse avec Rancking Oliver, Baby Bronx entre autres. On a eu l’occasion de faire la première partie d’un concert de Jean-Michel Rotin au Centre des arts et de la culture à Pointe-à-Pitre. D’ailleurs, on lui a volé sa première, j’espère qu’il m’excusera, notre passage devait durer 30 minutes et on a fait 2 heures, du coup c’est lui qui a fait une demi-heure…
J’ai joué avec pas mal de Jamaïcains aussi, à l’époque, c’était pas encore la tendance de les faire descendre aux Antilles françaises, mais eux débarquaient par eux-mêmes et venaient chez nous direct…
J’ai rencontré aussi Frédéric Caracas (bassiste de Kassav’ de 1991 à 1995) et d’autres belles personnes. J’ai de bons souvenirs malgré le fait que j’étais SDF, car je ne suis plus retourné chez mon oncle, tout se passait à Pointe-à-Pitre donc c’est là que je voulais être. J’allais souvent à Carénage…
Ouais, Carénage, un des ghettos de Pointe-à-Pitre à l’époque…
Oui, c’était un des seuils de la rue, d’ailleurs on m’a dit que tout a été rasé depuis… J’avais des amis dans ce quartier, je buvais mon p’tit rhum là bas tranquille, mais à un moment, j’ai estimé que j’avais fait le tour, et la métropole me manquait.
A ton retour sur Paris, qu’est-ce qu’il s’est passé ?
Déjà, 3 jours après mon arrivée, je me suis fait choper par les flics, lors d’un contrôle, parce que j’étais dans une BMW avec une fenêtre cassée, les flics pensaient que c’était un véhicule volé. Du coup, j’ai du refaire mes 3 jours à la Caserne de Mortiers à Porte des Lilas, je m’en souviendrai toute ma vie, ils m’ont demandé si j’étais insoumis ou déserteur.
Des mecs m’avaient prévenu que pour un déserteur, c’était la taule direct. Donc, je me suis déclaré en tant qu’insoumis. Ensuite, j’ai donc continué la musique, tout est parti de la rue… 2 Bal 2 Neg’ s’est construit dans la rue.
Ton aventure avec 2 Bal 2 Neg’ commence donc dès ton retour sur Paris. comment tu rencontres Niro (2 Neg’) et les 2 Bal ?
En fait, Niro est une personne qui a toujours compté dans ma vie, il a toujours aimé la musique et lorsqu’il avait 8 ans, il était déjà venu me voir, moi qui était un peu plus grand, il me disait « je veux rapper ».
Babass est aussi venu me voir très jeune, c’est pour ça que maintenant quand je les vois, j’ai des yeux d’amour pour eux, car on s’est connus gamins. J’étais un gamin aussi, mais eux me voyaient comme un gros rappeur, car à l’époque quand tu avais rappé à Radio Nova, tu avais une identité incroyable. Je sais que Niro (2 Neg’) avait repris le flambeau de notre groupe Gentlemen MC, et quand je l’ai revu, je me souviens qu’on était en train de marcher à Villejuif. Je l’ai regardé et lui ai dit : « écoute, on se laisse 6 mois pour marcher dans le rap français, si ça marche pas, on arrête ».
Et notre carrière a décollé direct, on est partis chez Moda & Dan qui préparaient la première compile indépendante, là-bas on a rencontré La Cliqua, Les Sages Po’, Booba et Ali.
Donc là, vous vous présentiez comme étant les 2 Neg’. Raconte-moi la rencontre avec les 2 Bal.
Ben déjà à l’époque, les jumeaux s’appelaient les BB MC. En fait, à chaque fois que l’on faisait des concerts, c’était les mêmes groupes de rappeurs qui se retrouvaient. Tu avais Kaysha qui rappait et a évolué dans le zouk depuis, il y avait K-reen qui rappait aussi à l’époque, elle était très forte avec son groupe RootsNeg…
Alors l’association 2 Bal 2 Neg’ se fait à ce moment là ?
Ce qu’il s’est passé, c’est que je bossais avec White & Spirit, et les jumeaux avec Masta et Tefa. J’ai rencontré Tefa après un de mes concerts à l’Olympia, et à ce moment-là, on avait un groupe avec Soldat Yaya qui s’appelait Maximum Respect, ça c’était juste avant les 2 Neg’. D’ailleurs, c’est Yaya qui m’a vraiment mis dans le rap, je le respecte à mort…
Donc à force de rencontrer des gens en concert et tout, tu créées des affinités avec certains. J’ai sympathisé avec des gens qui évoluaient autour des 2 Bal comme Tizai et M.A.S, des mecs qui comptent maintenant…
Donc moi, j’ai commencé à organiser des concerts à Villejuif avec Ministère A.M.E.R, Timide et Sans Complexe, Little MC, nous-mêmes etc… Un jour, j’ai voulu inviter les 2 Bal, mais ils n’ont pas pu venir. Finalement, c’est dans un autre concert que je les ai revus, et on s’est super bien entendus. Moi j’étais à la rue, eux avaient des soucis avec leur daron, c’est à ce moment là que l’on a décidé de faire un album en commun. Nos producteurs respectifs se sont mis d’accord, et ça a commencé comme ça. On avait la rage, c’est arrivé que l’on pète des studios pour enregistrer… J’ai de bons souvenirs de cette période, notamment au Studio Bastille avec un mec que j’adore, Fred Dudouet, qui était notre ingé sur l’album 3 x Plus Efficace.
Fred Dudouet a produit des sons dans votre album ?
Non, pas dans l’album, il a juste fait les prises de voix. Par contre il avait produit un son avec Daddy Lord C, Rocca et moi, j’aimerai bien qu’il me redonne cette prod (rires). Elle était magnifique !
Donc revenons sur ton aventure 2 Bal 2 Neg’…
Ce que j’ai vécu c’est un délire très particulier et avec 2 Bal 2 Neg’, on a fait le premier disque indépendant qui s’est vendu à 100 000 exemplaires dans le rap français, ça c’est important de le préciser. Il faut savoir aussi que le mec qui nous a fait confiance, notre éditeur, c’était un mec du cinéma, Pascal Caucheteux (Why Not prod) qui a produit entre autres le film Ma 6-T va Crack-er et très récemment coproduit le film The Purge (American Nightmare), je le remercie vraiment. C’est mon éditeur encore aujourd’hui.
L’album 3 x plus Efficace est un classique du rap français, il sort en 1996, que se passe t’il après pour toi ?
Après, il y a la bande originale du film Ma 6-T va Crack-er produite par Cercle Rouge (White & Spirit)…
Oui, on te retrouve sur deux titres : « Le temps des opprimés » avec Niro et Mystik ainsi que sur « Le prix requis » avec Yazid…
Oui, mais j’ai fait beaucoup de titres avec Cercle rouge, et ça marchait, notamment « Noir et Blanc »…
« Noir et Blanc » putain d’titre…
Ouais, et en fait suite à ça, je devais faire un album avec eux, mais il s’est passé un truc particulier, en fait je n’ai rien contre eux, aucune rancune quand je dis ça, mais ils se sont perdus entre faire l’album 2 Neg’, faire l’album Eben, et faire l’album de Mystik… J’ai eu du mal avec ça, car ils prenaient grave du temps à faire les prods.
Ensuite, Doc Gynéco voulait me produire par rapport au titre « Noir et Blanc » qu’il avait kiffé, mais c’était pas possible car j’étais en contrat, c’était compliqué, donc ça ne s’est pas fait… Du coup, Masta et Tefa m’ont aidé à racheter mes droits… C’est là que j’ai commencé à bosser avec Kilomaître.
Ok, donc pour rappel, à cette époque l’industrie du disque se portait beaucoup mieux qu’aujourd’hui. Quels ont été tes plus gros succès à ce moment là ?
En fait c’est simple, 2 Bal 2 Neg (3 x plus efficace), Ma 6-Ter va Crack-er, 16:30… Tous disques d’or…
Sachant qu’à cette période un disque d’or c’était 100 000 ventes, ça donne une idée de l’impact commercial que ces projets ont eux sur les gens…
Grave, et il y en a eu d’autres …
Peux-tu me parler de vos expériences sur scène avec 2 Bal 2 Neg’ ?
C’que j’ai aimé avec 2 Bal 2 Neg’, et qu’on ne pourra jamais nous retirer, c’est que scéniquement, on était considérés comme étant l’un des meilleurs groupes de rap français.
En fait, on avait un show assez impressionnant, on a fait un milliard de dates, le tour de la France dix fois, le Canada… On avait un répertoire qui nous permettait de tenir 2 à 3 heures sur scène. En plus on avait un show DJ qui pouvait durer de 10 minutes à 1 heure de temps…
Mon plus beau concert, c’était à Troyes. On devait jouer 45 minutes, on a joué 2 heures et quand on est repartis, le public nous a rappelés. Finalement le show entier a duré 2h30. Sinon, supers concerts à La Rochelle, à Rennes aussi, mais là-bas on a eu des soucis, parce que c’est parti en couilles, y’a eu un gros bordel dans le public et le maire a porté plainte contre nous.
Sinon gros regret au Canada, je m’excuse encore auprès des Canadiens, quand je suis arrivé là-bas, j’ai demandé « qui est le Jean-Marie Le Pen de chez vous ? » On m’a balancé un nom et je l’ai sorti spontanément en plein concert sans avoir vérifié au préalable, il s’avérait que c’était faux, donc j’m’excuse encore pour ça…
Dans le film Ma 6-T va Crack-er de Jean-François Richet, on te voit rapper sur scène avec Niro (2 Neg’) et Mystik, et à un moment, je sais qu’il y a eu une vraie bagarre que le réalisateur a filmé, on voit bien le mouvement de foule dans une scène, tu confirmes ?
Ouais, Jeff (Jean-François Richet), c’est un personnage qui dans ma carrière a beaucoup compté, c’est un mec qui ressent les choses, pour moi c’était un visionnaire. Beaucoup de gens ont critiqué et n’ont pas compris ce film, mais il avait un putain de talent. Il n’a pas voulu faire un La Haine, il voulait faire un truc réel, et c’est 10 ans après que certains s’en sont aperçus…
Moi, on m’a dit, « vas-y rappe sur scène, c’est pour un film« . Mais j’étais pas rationnel, je me disais : « de quoi on me parle ? Je vais vraiment être dans un film ? « Ok je chante ! », « Jeff t’es sûr ? », « Ouais chante, on filme ! »…
C’était à la limite du comique. En fait, tout était vrai dans la boîte, les gens qui dansent, les gens qui s’bagarrent et même à la fin avant qu’on sorte de la boîte, y’a eu une grosse embrouille entre des mecs de Meaux et de Paris… En fait, les mecs de Meaux ne laissaient plus sortir les mecs de Paris… Et tout le long du film, y’avait du réel comme ça.
Sur la B.O du film, il y avait du lourd, c’est l’une des compilations qui a marqué l’histoire du rap français. En avais-tu déjà conscience à l’époque ?
Pour moi c’était un classique, X.Men, Mystik, etc… Et peu importe qui rappait avec tel style ou tel autre, Cercle Rouge avait le truc, je ne sais pas s’ ils l’ont encore maintenant – peut importe, c’est pas le sujet – mais en tout cas à cette époque, ils l’avaient le truc.
En terme de prods, les plus forts étaient Kilomaître et Cercle Rouge, y’avait pas mieux. En prods mélancoliques et tout y’avait pas mieux… Nous, les rappeurs, on était tous à fond, on donnait le maximum, tous on était lourds, et y’a une équipe importante pour moi aussi, c’est l’équipe de Fabe (Scred Connexion).
Au-delà de l’aspect artistique, Fabe, je n’oublierai jamais qu’il m’a logé après une sortie de concert à Pigalle, alors que j’étais à la rue. C’est Lady Laistee qui m’a dit : « y’a quelqu’un qui veut te parler », et Fabe m’attrape, j’étais sur un banc, je comptais dormir là. Il m’a dit « écoute, moi j’pars en concert avec La Scred’, si tu veux tu peux dormir chez moi ». Je ne l’oublierai jamais de ma vie. C’est là que j’ai rencontré Koma et toute La Scred’ au Square Léon. Fabe c’était un vrai rappeur, d’ailleurs on a fait un son ensemble : « 24 heures » sur PC1 (Première Classe).
Maintenant, tout autre chose, je voulais rebondir sur un artiste présent sur les albums 2 Bal 2 Neg’ (3 x Plus Efficace) et Ma 6-T va Crack-er, il s’agit de Tiwony, que le public hexagonal a découvert sur ces 2 projets. Il me semble que tu y es pour quelque chose, non ?
Oui, on peut en effet dire que j’ai contribué à faire connaître Tiwony au niveau national. Un jour, j’étais dans le RER, j’allais en studio, et je vois un mec avec un Walkman en train de chanter façon Jamaïcan style, je lui demande s’il chante et tout, il me confirme et on commence à discuter. Je lui ai proposé direct de venir avec moi en studio, il ne me croyait pas, mais il est venu quand même. On lui a fait écouter ce qu’on faisait, et c’est comme ça qu’il a posé sur le titre « Est-ce qu’on flingue ? »
C’était sa première apparition sur disque. Après, Cercle Rouge lui ont demandé de poser sur Ma 6-T va Crack-er, et c’est comme ça que le titre « Pas de timinik » est né. Et je précise que Tiwony est un artiste que j’adore…
Beaucoup de gens ne le savent pas, mais tu as produit pas mal de beats sur différents projets. Et aujourd’hui tu es producteur à plein temps. A quel moment commences-tu à composer ?
J’ai commencé la compo en 1997. En fait, à l’époque de mon morceau « Noir et Blanc » mon éditeur et Masta me disaient que j’avais un talent d’écoute, que je savais repérer les bons samples…
Tu avais l’oreille…
Ouais, j’avais l’oreille. Même Masta, je l’ai épaulé sur la recherche de samples, comme par exemple sur le titre « Labyrinthe » dans l’album 3 x Plus Efficace.
Mais c’est Masta qui m’a vraiment appris à faire de la musique, il était plus pointu que moi, et c’est le mec le plus professionnel que j’ai rencontré. Je le dis ouvertement, c’est véridique, Masta et Tefa m’ont beaucoup apporté, je le reconnais, je ne cache rien.
Un jour, j’ai eu un business éditorial, et j’avais le choix entre payer un loyer ou acheter du matos. J’ai acheté une MPC 2000, mais je ne te cache pas que pendant 20 jours j’ai regardé mon matos en me demandant si j’allais sortir une prod ou pas. Et puis un jour, je me suis réveillé et je me suis dit que ça servait à rien d’avoir une MPC pour ne pas l’utiliser… Et puis j’ai commencé à faire des beats et ça a pris tout de suite !
Sur quels projets commences-tu à placer tes beats ?
Une des premières prods que j’ai vendu, c’était à Hamed Daye sur son album L’Or Noir. Sinon, sur le premier album de Sniper (Du rire aux larmes), j’ai produit 2 titres : « Faut de tout pour faire un monde » et « Aketo vs Tunisiano » . J’ai placé une prod sur l’un des albums de Stomy Bugsy, mais je me souviens plus du titre.
J’ai fait beaucoup de beats pour les gens mais je ne me souviens pas de tout… J’ai une prod dans l’album de Zoxea (Dans La Lumière) pour le titre « Une fois que c’est terminé ». J’ai produit 2 sons sur un album de Canibus (C True Hollywood Stories), J’ai bossé pour Cash Crew également. Pour Tandem, j’ai fait un morceau sur leur premier album Ceux qui savent m’écoutent, et dans leur trilogie, j’ai fait le chapitre 2 « Frères ennemis » .
Sinon, j’ai produit la moitié de la compilation Mission Suicide, notamment le titre avec Diam’s, Princess Aniès, Isis et China… Plus tard, j’ai placé une prod sur l’album de Lino (Paradis Assassiné) pour le titre « Paradis AirLines »
Elle était magnifique la prod de « Paradis AirLines ».
Ouais, c’est une de mes plus belles prods. Elle m’a valu beaucoup de propositions, même à l’étranger… Des propositions des states que les gens ne soupçonnent même pas. Mais bon, ça ne m’intéresse pas de faire des beats pour les cainris, les mecs ne payent pas. J’ai produit pour Bakar aussi, j’ai produit l’intégralité de l’album de Tonio Banderas (Boycott) et aussi la quasi totalité du 2ème album de Fdy Phenomen (Qui peut tuer la rage d’un assassin ?).
Dans la compilation Mission Suicide, on te découvre sous un autre jour en featuring avec Dadoo sur le morceau « Gomez et Tavarès (Les ripoux) ». D’ailleurs, Disiz est en guest dans le clip, habillé façon « j’pète les plombs »… Raconte un peu la genèse du concept…
Disiz, c’est une longue histoire… Un truc que personne ne sait : Disiz, c’était le mec qui devait faire Gomez et Dubois avec moi… Mais pour revenir au morceau « Gomez et Tavarès (Les ripoux) », il faut savoir qu’à la base, ce morceau était pour mon album.
J’étais avec Dadoo et Tefa qui nous avait trouvé un appartement, magnifique vue, en plein Paris, c’était canon et tout, on a commencé à tiser et à écrire. Ensuite, j’ai dit à Dadoo, « viens on se fait passer pour des flics de banlieue ». On cherchait des trucs, et j’avais un CD de Cash Crew, des anglais qui nous avaient fait 15 prods pour le projet Mission Suicide. Donc j’ai trouvé un beat dedans et on a commencé à écrire.
Est-ce qu’ à l’avance, vous aviez déjà en tête de tout défoncer commercialement avec ce morceau ?
Non, non… Mais c’est une très bonne question ! Je vais t’expliquer. A cette époque là, je venais d’avoir ma fille. Un jour, il s’est passé un truc dans ma tête. Masta et moi cherchions des gueules pour faire la pochette de Mission Suicide. j’ai fait des castings sauvages, castings classique également. Les mecs, on leur mettait des couteaux dans la bouche, on prenait des photos.
Quand on bossait, c’était jusqu’au bout, c’est ce que j’adorais avec Masta et Tefa, les mecs étaient professionnels de A à Z… Donc quand j’étais en train de bosser le son avec Dadoo, je me suis dit à un moment « Mais pourquoi ma fille ne kifferait pas voir son père rigoler ? ». « Pourquoi ne pas faire un truc moins négatif ? ».
Ce qui est marrant, c’est que le jour où j’ai eu l’envie de changer de vie, c’est le jour où j’ai trouvé le modèle pour la pochette, qui était en fait le garde du corps de Jamel Debbouze de l’époque. Il s’appelait Stéphane. J’ai dit à Masta que j’avais trouvé le mec qu’il fallait, et c’est lui qui a été retenu, c’est lui que l’on voit sur la pochette avec le couteau.
Pendant la séance photo, je me disais qu’on avait trop de mélancolie en nous. Je venais d’avoir un enfant, je lui donnais le biberon et j’étais là, je faisais une pochette d’un mec avec un couteau dans la bouche… J’ai eu comme une prise de conscience. Qu’est ce que ma fille allait entendre de moi plus tard ? C’est comme ça que ça c’est passé, et tout mon changement s’est passé comme ça … Le titre « Gomez et Tavarès » a changé ma vie.
Par la suite, Dadoo est remplacé par Faf La Rage, l’aventure « Gomez et Tavarès » devient « Gomez et Dubois ». Que s’est t’il passé ?
Ce qui s’est passé, c’est qu’on a sorti le morceau en « single », on a fait le clip et là, gros succès. Derrière, y’avait Skyrock. Moi, quand j’écoutais Skyrock, c’était à l’époque de Tabatha Cash. D’ailleurs, même elle avait kiffé le morceau. Même Fun Radio nous kiffait, notre première interview là-bas a été faite par Eric et Ramzy.
Par la suite, Masta et Tefa m’ont mis devant un gros dilemme. Soit on continuait en créant un Posse Mission Suicide avec Diam’s, Sniper, Bakar et d’autres, soit on faisait l’album de Gomez et Tavarès. Franchement, je ne savais pas quoi faire, Masta me disait déjà qu’il serait bien de se recycler, etc… Que moi j’arrête le rap et qu’on se concentre sur les beats. Mais finalement, j’ai choisi de faire Gomez et Tavarès. On a proposé l’idée à Dadoo et il a refusé. C’est à ce moment là qu’on est allés voir Disiz. Il était chaud, mais était sur son album, donc ça n’a pas pu se faire. Après, on m’a suggéré Faf La Rage, on s’est rencontrés et on s’est super bien entendus. On est parti sur Gomez et Dubois.
Enregistrement magnifique, le plus bel enregistrement de toute ma vie, je n’en referai jamais un autre comme ça. Des putains d’studios à Béziers. Une entente incroyable avec Faf’, on ne s’est jamais embrouillé. Chris Chavenon comme ingé son, qui travaille magnifiquement bien. Niveau beats, y’a Yvan qui a bossé sur l’album aussi, il était super fort.
Connais-tu les raisons pour lesquels Dadoo a refusé de continuer l’aventure?
Dadoo avait une équipe formidable, je sais qu’à l’époque il avait eu des propositions avec Joey Starr, donc il s’est affilié à lui. Joey, c’est pas quelqu’un sur qui je crache, je le respecte. En plus, il a fait tourner mon gars Fdy Phenomen. Mais tu vois, même si je n’ai pas validé tous ses concepts à Joey, NTM « Le nord transmet le message » à cette époque j’ai toujours adhéré.
Parle-moi justement du revers de la médaille, par rapport à votre direction humoristique assumée, genre rap caricature de flics ripoux…
Avec Gomez et Dubois le truc relou, c’était les costumes. J’avais envie qu’ au moins une fois on me dise : « enlève ta perruque et assume ». Mais tu vois, on s’est toujours cachés derrière les trucs c’est facile ! C’était trop facile… J’ai fait Fogiel, j’ai fait quatre ou cinq fois Ardisson, mais ce que j’aurais vraiment kiffé, c’est au moins une fois retirer ma perruque sur le plateau et dire : « Je m’appelle Eben etc… » Tu vois ce que je veux dire ?
Ouais, en fait tu as kiffé tout ça mais à travers un personnage…
Voilà, à travers un personnage, et si je suis resté déguisé c’est que je respectais le concept, je respectais Faf La Rage, je me respectais, car le délire c’était de jouer un rôle jusqu’au bout. Mais j’assumais, et si on me proposait de le refaire aujourd’hui, je le referais.
D’après toi, comment Faf La Rage a vécu le truc ?
Il a adoré ! Faf La Rage, c’est le meilleur personnage que j’ai rencontré dans le rap français, et ça je veux que tu le notes !
Je le note, je le note ! (rires) … Donc Faf La Rage a adoré…
Non seulement il a adoré, mais c’est cette aventure qui lui a permis plus tard d’enregistrer le morceau pour la série Prison Break. Ce qui lui a permis d’être un des plus gros vendeurs cette année-là ! J’étais vraiment content pour lui. Je le respecte à mort ! A chaque fois qu’on devait se déguiser, pour lui c’était du plaisir, et quand il a eu son contrat pour le titre « J’ai pas l’temps » j’étais heureux pour lui, ça lui a permis de manger un peu avec sa musique. Je rajoute aussi que je ne cracherai jamais sur son frère Shurik’n et sur AKH non plus, c’est des vrais gars ! C’est une vraie équipe. Moi je suis parisien et eux marseillais, dans le foot on peut avoir des distorsions, des trucs qui collent pas, mais en amitié, moi ces mecs-là je les respecte !
D’un point de vue commercial, l’album de Gomez et Dubois s’est bien vendu ?
Les singles se sont plus vendus que l’album. On a fait 135 000 exemplaires pour « Hôtel Commissariat « , « Ronde de nuit » on a fait 200 000… L’album en lui-même, on a fait approximativement 80 000. Dans la même période, on a écrit le plus gros tube de Michael Youn « Alphonse Brown » (Le Frunkp). Faf La Rage a écrit les couplets rap, et moi le refrain chanté.
Cette période est très prolifique pour toi, qu’est-ce qui fait que ça retombe ?
Qu’est ce qui fait que ça retombe ? En fait, ça retombe le jour d’un décès dans ma famille, en 2005, où je perds toute mon énergie… Où je perds ma folie, où je perds mon envie, mon plaisir de composer, de rapper, quand je perds un proche. J’ai été plongé dans l’oubli pendant très longtemps, c’est un peu compliqué. Je suis vraiment au fond du trou à ce moment là. Je n’ai plus d’amour pour cette musique, les critiques, je m’en bats les couilles, là je parle vulgairement maintenant…où en fait, j’ai plus envie.
J’ai perdu la personne la plus proche de moi, qui me passait un coup de fil tous les jours pour me dire « je t’aime », pour me dire « Dédé (Derek) On fait quoi ? ». Il voulait être dans tous mes clips (rires). D’ailleurs, il était dans tous mes clips depuis 2 Bal 2 Neg’.
Enfin voilà, c’était une personne proche et en fait j’ai vraiment eu du mal à rebondir. Je ne le cache pas, la perte d’un proche, c’est quelque chose de…de violent. Mais c’est très violent. Donc à cette période, entre 2005, 2006, jusque début 2007, je ne peux te parler d’aucun rappeur. J’étais dans un gouffre, et j’ai vraiment eu du mal à en sortir. Je ne sais même pas si aujourd’hui j’en suis vraiment sorti…
Après une épreuve comme celle-ci, qu’est ce qui te donne l’envie de revenir dans le son ?
Un jour, je suis allé à Bastille et j’ai rencontré Fdy Phenomen qui bossait là-bas et avec qui j’avais déjà bossé sur Mission Suicide. Donc on se parle, et je lui dis que pour me remettre dans le bain, j’aimerais bien faire son deuxième album.
Qu’est ce que j’ai pas dit ce jour-là (rires)… Merde, je ne savais pas dans quoi je m’engageais, mais je ne savais pas que lui aussi vivait une période compliquée. Voilà, et quand deux personnes ne sont pas au mieux, ça prend du temps, c’est très très long… L’album Qui peut tuer la rage d’un assassin ?, on a commencé à le bosser en 2007, pour une sortie en 2012.
Dans le même temps, j’étais en train de travailler avec une personne qui ne m’avait jamais lâché à l’époque, une personne pour qui j’aurais donné ma vie, c’est Tonio Banderas, quelqu’un qui a un gros talent, que je trouve très fort. C’est un gars qui m’a toujours suivi depuis le début… Fdy a été pour moi un élément important, il m’a aussi redonné l’envie d’écrire et m’a présenté à tous les membres de son équipe. C’est avec plaisir que je bosse avec quelques uns d’entre eux aujourd’hui.
Aujourd’hui, quels sont tes rapports avec Niro (2 Neg’), les 2 Bal, Tefa et Masta ?
Niro (2 Neg’) vit aux Etats-Unis, il s’épanouit dans le cinéma, les courts métrages et tout ça… Je suis fier de lui, parce qu’il a trouvé sa voie. Il ne le dira pas lui, mais il est mon bras droit. Et même si moi, je ne suis plus son bras droit dans le domaine qu’il a choisi, je suis content, il va au bout de son truc. Sinon, avec les jumeaux, on prépare une tournée 2 Bal 2 Neg’ pour les 20 ans… Concernant Tefa et Masta, je les considère comme des amis à vie.
La tournée 2 Bal 2 Neg’ est prévue pour quand ?
Bientôt !
J’aimerais aborder l’aspect technique. Je sais que tu bosses principalement avec la MPC 2500 aujourd’hui. Tu as toujours produit avec ce genre de machine ?
Non, disons que j’ai travaillé avec pleins de matos différents. Au niveau rythmique, c’est vrai que je trouve que la MPC est très violente.
Le séquenceur de la MPC est assez droit, assez carré…
Oui, disons que rythmiquement la MPC est très violente, mais que c’est un peu différent selon le modèle. Je serais prêt à reprendre la MPC 2000, car niveau rythmique, c’est un caisson de ouf. La 2000 XL, elle est trop cuivrée à mon goût, trop électronique, j’sais pas j’aime pas trop… La 3000, t’as pas le découpage, la 2500, la 4000 et tout ça c’est un bon réseau. Maintenant, ça fait 5 ans que je bosse avec des logiciels en complément de la 2500… Mais je ne vais pas dévoiler tous mes secrets (rires).
As-tu déjà bossé à l’ancienne avec la légendaire SP12 ?
Non, moi jamais, mais je me souviens que Masta l’utilisait. C’était vraiment un pro de la SP12…
Justement, toi qui a croisé énormément de monde, qui t’as marqué dans le rap français ?
Il y a Tefa, Masta, les 2 Bal, Niro (2 Neg’) et moi même, je me suis marqué aussi… Que veux-tu que je dise d’autre ? (rires) C’est ma vie dans le rap, véridique. Ma carrière dans le rap, c’est eux…
Au-delà de ces personnes qui étaient très proches de toi, donne moi ton « top 5 intemporel du rap en France »
Je vais te le dire, mais je ne vais pas te donner d’ordre, parce que c’est ridicule. Y’en a toujours un qui va être plus fort que l’autre, selon un moment donné… Tu sais pourquoi ? Les gens disent que Booba est n°1, Rohff n° 2, Médine n° 3, Maître Gims etc… Mais non ! C’est pas vrai, ça dépend des morceaux. Sur tel ou tel morceau, l’un d’entre eux sera plus fort que les autres… C’est ridicule de dire que lui est plus fort que lui.
Je comprends ce que tu veux dire, mais il y en a bien un, qui dans son œuvre globale t’a marqué plus que les autres, non ?
Non ! Ils sont tous influencés ! J’peux pas dire qu’il y en ai un au-dessus… Pour la France, les mecs sont forts, mais un mec comme Booba par exemple est à la pointe de l’influence américaine, Rohff c’est pareil, Maître Gims aussi… Ils sont tous forts… Ils sont forts dans ce qu’ils font. Kaaris, je le kiffe, c’est un ami, je les kiffe tous les frères, mais ils sont tous influencés…c’est la vérité.
Pour compléter ta réponse, quel est ton regard sur le rap français aujourd’hui ?
Pour moi, tu as deux types de profils dans le rap français. Tu as des gens qui pensent à aller dans l’évolution US et tu en as d’autres qui restent dans la normalisation FR sans risquer de se cramer les ailes. Tu as l’exemple de Seth Gueko qui reste droit dans ce que j’appelle «le rap français».
Donne moi ton avis sur La Fouine ou Rohff par exemple…
Non mais La Fouine c’est différent, il est dans un concept populaire avec ses émissions TV et tout… Moi je ne cracherai jamais sur La Fouine, sur Rohff non plus, c’est impossible. Rohff, il se bat, il est attaqué de partout, c’est normal qu’il se défende. Tant que ça reste dans l’esprit d’auto-défense, je suis d’accord. Le mec a des comptes à régler, il les règle… Après, la question des chiffres de vente, dès que tu rentres dans ça, c’est mort… Les histoires d’égo, c’est pas bon, on s’tue tous entre nous dans ce cas là.
Ton top 5 universel, toutes musiques confondues ?
Marvin Gaye, Bob Marley, James Brown, Michael Jackson, Quincy Jones. Mais au niveau de mes influences, il y avait aussi Kassav’ et Tabou Combo…
Ton top 5 rap US ?
Nas, Tupac, Biggie, Dr Dre, Eminem. Un petit clin d’œil aussi à Mobb Deep car je kiffais leurs morceaux…
Un mot sur les producteurs de France ou d’ailleurs ?
A l’heure actuelle, c’est un peu compliqué, c’est confus. Disons que pour les produits de la tendance actuelle du rap, Therapy c’est très bon dans le délire. Le problème, c’est que les mecs me donnent l’impression de ne savoir faire qu’un seul style… Mais concernant le créneau en question, Therapy c’est très fort, je valide tout de suite. Sinon, chez les cainris, j’aime beaucoup Sid Roams, Jahlil Beats… J’aime bien Dj Khaled, mais c’est un peu toujours la même chose. Sinon, je vais citer des mecs que je trouve très forts et qui sont dans mon équipe Kill Me Prod, c’est Kevin et Tony.
Kille Me Prod, c’est quoi ?
Nous sommes un collectif de trois beatmakers, Kevin Smith, Tony Punchline et moi, avec d’autres membres comme Djino, des musiciens comme David au clavier qui gravitent autour de nous…
Que préparez-vous en ce moment ? Tu comptes reprendre le micro un jour ?
On est sur pas mal de projets, de rappeurs, chanteurs, chanteuses etc… Sinon, oui, on bosse sur mon album solo également.
Ton album est prévu pour quand ? Tu comptes l’appeler comment ?
Le nom de l’album ? C’est Le 8éme Jour… Le titre, je l’ai depuis cinq ans… Ce sera un jour différent pour tous les rappeurs ! Pour la date, disons que j’ai le projet dans la tête, ça prendra le temps que ça prendra, car j’ai tellement à faire sur l’album des autres, que je ne peux pas être sur moi à 100 %, mais j’ai déjà des morceaux enregistrés.
Parlons un peu cinéma, je sais que tu as bossé un peu dans ce milieu, tu confirmes ?
Comme je te l’ai dit, mon éditeur est un producteur de films, Pascal Caucheteux (Why Not prod). C’est un mec remarquable. Pour moi c’est un visionnaire, il sait ce qu’il fait. A la base, j’étais pas dans le cinéma et après la sortie du premier film Gomez et Tavarès, on m’a proposé d’écrire la suite, Gomez vs Tavarès. Sur le moment, je me suis dit que je n’en étais pas capable, et puis un jour, je me suis mis à écrire.
Et là, tu deviens un peu comme un gamin qui a besoin de prouver à son prof qu’il est capable de faire des choses. C’est ce que j’ai fait. J’ai récupéré des logiciels pour écrire de façon professionnelle et ça a marché. J’ai également composé la musique du film avec Jacojack, je suis crédité aussi comme étant co-créateur de l’idée originale, et j’apparais également dans les deux volets. Sinon, une fois on m’a donné ma chance en tant qu’acteur, j’ai eu un vrai rôle, dans un film anglais dont j’ai oublié le nom et dans lequel je joue un amoureux déchu… C’était une bonne expérience.
Donc tu parles un peu anglais ?
Oui, je parle anglais couramment.
Comment les personnages Gomez et Tavarès, que tu as créé avec Dadoo se retrouvent adaptés au cinéma ?
En fait, après qu’on ait sorti le morceau, Luc Besson nous a appelé, ce n’est pas moi qui l’ai eu. Il a proposé qu’on rencontre sa directrice artistique. Donc on est allé boire un verre avec elle, c’était à l’époque de Taxi. Elle nous faisait comprendre que Luc Besson voulait absolument faire le film « Gomez et Tavarès » mais avec nous, c’est à dire qu’il voulait que Dadoo et moi fassions nos personnages dans le film. Moi j’étais chaud ! Mais le problème, c’est que Luc Besson prenait des mois avant de revenir vers nous. Donc entre temps, Gilles Paquet-Brenner a dit qu’il faisait le film. Finalement, c’est avec lui que ça s’est fait.
Eben, merci, on est arrivé au bout de cet entretien. Pour terminer, je vais demander à l’« old-timer » que tu es de nous dévoiler une anecdote au hasard, une histoire en relation avec le hip-hop, mais qui n’a rien à voir avec toi. Une information que les lecteurs de ReapHit.com ne seraient pas susceptibles de connaître.
J’en connais des histoires dans le rap, j’ai vécu beaucoup de choses… Peu de gens le savent, mais en 1989 / 90, DJ Premier a fait un concert à Aubervilliers, et des gars à lui sont venus pisser sur la foule. Ensuite le camion de DJ Premier s’est fait retourner, et c’est pour ça qu’il a pris vingt ans avant de revenir en France…
Interview réalisée sur la base d’une conversation entre Eben et Maj Trafyk.
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