12 février 2016, friday strikes back

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12 Février final

« On pensait que c’était des supporters bourrés qui faisaient la fête pour célébrer le score nul de l’OM contre Toulouse. Et puis quand j’ai vu que le polo blanc RL de Riton était devenu tout rouge, j’ai compris que ce n’était pas des pétards »

C’est un matin comme les autres sur la cité phocéenne, à cette heure matinale le trafic est presque nul sur le vieux port, quelques groupes éparses tapent la discussion sans remarquer la voiture noire roulant au pas arrivant à leur hauteur. Vitre baissée, les salves détonnent comme un bruit assourdissant, l’écho dans la ville dormante amplifiant le bruit. Les corps se plient puis tombent, le voisinage, par réflexe, s’agglutine aux fenêtres à moitié réveillé juste le temps de voir repartir la voiture noire en toute tranquillité, contrairement aux survivants et témoins de la scène courant dans tous les sens sans logique. Vingt minutes après, les forces de l’ordre et les premiers secours se déploient, suivis quelques instants plus tard par les fourgons des médias. Les mots sont sur toutes les bouches « encore un règlement de comptes » sauf qu’à l’autre bout de la ville, une voiture noire fenêtre baissée recommence son cycle criminel.

« Habituellement, la machine elle bipe si il y a quelque chose de suspect, là elle n’a pas bipé, ça veut dire qu’il n’y avait rien de suspect quand ils ont passé le portillon de sécurité »

Paris, une heure plus tard. La ville est en pleine ébullition comme chaque jour maintenant, le flux des piétons vient compléter celui des voitures. Bouchons, problèmes de transport, cadres sous speed ou coke, le fil du quotidien est tendu mais ne lâche pas. La France a beau être en état d’alerte et autres plans Vigipirate, il semble que les services de sécurité de l’Assemblée Nationale n’étaient pas en alerte quand un groupe d’individus entre dans l’hémicycle en grande partie vide, certains bloquant les issues tandis qu’un homme barbu recouvert d’un bonnet éjecte devant les visages béats de nos chers élus le président de son perchoir, vêtu d’une parka fermée dont les plissures ne laissent présager rien de bon. L’alerte ne met pas longtemps à se mettre en place, périmètre de sécurité entre Solferino et Concorde, route coupée et piétons priés de faire demi-tour. La tension est palpable et le spectre des attentats pas loin d’assombrir les cerveaux.

« A chaque fois qu’il sort un truc, il essaye de tuer tout le monde. Le mec a pas de limite, un putain de coréen du nord, si bien que j’ai envoyé vivre ma famille à Beyrouth, c’est plus safe »

New York City, à quelques minutes près, la nuit est bien avancée mais comme à son habitude, la ville n’est encore pas prête à s’endormir. La faune nocturne bien plus sauvage et intrigante que celle de jour donne une vision moins lumineuse à la ville. Le débit des taxis jaunes semble ininterrompu, rejoint parsèment par les sirènes hurlantes des services de la ville. Dans le quartier de Crown Heights, des petits groupes se forment devant les deli, dégustant un dernier sandwich avant de se rentrer. Le changement de luminosité dans le ciel noir n’est pas tout de suite perceptible, mais au compte-goutte les maraudeurs de nuit commencent à se figer, scrutant déconcertés le ciel en essayant d’analyser ce qui se présentent à eux, un vrombissement musical en fond, une voie rageuse par-dessus. Peu seront ceux qui en comprendront la dangerosité avant les premiers impacts. Mais dès les premières météorites rentrés en collision, la panique s’installe, et très vite, la fatalité prend place, quand ceux encore vivant réalisent qu’une pluie de météorites continue s’abat sur eux.


Les dépêches tombent de l’AFP et de l’Associated Press, le monde des médias est en hyper stimulation tandis que les services d’urgence s’organisent dans la cohue sur les 3 lieux attaqués. Personne ne cherche à faire de rapprochement, personne ne voit le fil invisible qui relie ces 3 événements…

Marseille, rien ne prédispose les autorités à annoncer que les victimes sont connues des services, « les victimes ont l’air normales bien que mortes ». La seconde fusillade devient deuxième quand une nouvelle alerte au drive by shooting est annoncée, deux corps de plus, et l’homme à la place du mort continue son périple assassin. D’après les témoins oculaires, l’homme semble posé et non pressé, vêtu d’un polo RL et Air Max aux pieds. « On l’a vu shooter un 16 bars facile, sans balles perdues » blunt à la bouche, fly zone, l’habitacle fume plus que le pot d’échappement, le milieu du grand banditisme est assez vite écarté puisque l’homme ne cherche pas à rester anonyme, les yeux se rivent donc vers le milieu du rap phocéen. Selon Francis Martoni, sociologue interviewé par BFM : « On a à faire à un mc peu exposé mais respecté, un orfèvre de la rime, un mec baigné aussi bien à la culture rap us que français. On peut directement écarter les grosses pointures du type Jul ou SCH, peu enclins à la finesse et surtout trop fragiles pour en être capables ». Dans le labyrinthe du rap marseillais, un nom commence à revenir : Perso.

« Au départ, on a cru qu’ils avaient déjà égorgé 534 députés façon abattoir de Rungis, puis après on s’est rendu compte qu’ils n’étaient juste pas là ». Palais Bourbon, 43 députés sur les 577 que compose l’hémicycle seraient donc pris en otage. Pour le moment, les présents sont à leur place, les caméras de télé n’ont pas été coupées, permettant ainsi aux services d’intervention d’avoir un œil sur ce qui se passe dans l’assemblée et aux médias de pouvoir balancer le direct. Le bonnet bien enfoncé, le leader présumé – surement un réfugié syrien salafiste – semble attendre devant le micro du perchoir. Une dernière prière avant de passer à l’acte ? S’interrogent les spécialistes des prises d’otage sur LCI. On ose imaginer le bain de sang qui pourrait se produire jusqu’au moment où la musique se met à retentir sur un compte à rebours. L’homme se présente d’une façon très bipolaire M.O.I., Moi Ou Il, l’homme ne semble pas savoir qui il est. Avons-nous réellement à faire un terroriste, ou juste à un déséquilibré ?

« A l’impact, la première a fait boom, puis la seconde a fait bap, boom bap quoi, you know what I’m sayin ? ». Des météoriques à base de boom bap ? Cela semble complètement irréel pour les spécialistes de la NASA requis sur place, « Présentement on n’est pas compétents, mais je peux vous certifier que Seul sur Mars est crédible, excepté le SHIELD je ne vois pas qui peut intervenir ». Crown Heights se voit déchiqueter à chaque impact tandis qu’à Brownsville, quartier voisin, on mange du pop-corn aux fenêtres en pensant que Michael Bay est en train de tourner la suite d’Armageddon. Au milieu du champ de ruines se dresse un homme dont l’ombre renvoie aux pires souvenirs, le boucher évadé de Trenton State Prison en 2010 via l’album The Exxecution, le destructeur au corps d’acier de Hardbodie Hip Hop de 2012, Ruste Juxx. On savait l’homme en liberté et capable à nouveau d’orchestrer une destruction massive de sa ville, mais de là à envoyer des météorites dans la gueule, on nage en pleine science-fiction. A l’annonce de l’identité du protagoniste, Bill de Blasio, maire de la ville, annonce : « Il n’y a pas d’autres alternatives que de fuir la ville, j’invite les habitants de Crown Heights à paniquer et aux services de la ville de rester sur Manhattan s’ils ne veulent pas finir en pancake ».

L’identification semble confirmée, l’homme derrière le fusil se prénomme Perso membre du groupuscule occulte et alcoolique RGC et du groupe Le Turf, déjà connu pour des faits de violence sur support digital comme Affaire personnelle et Sous-Entendu. « On l’avait dans notre fichier, mais pas dans les cas de danger imminent. On l’a laissé lui et les membres du RGC taper des barbecues et autres consommation de rhum international sans se douter Quel Deal se tramait » Commissaire Lapiche. Enchaînement de jobs merdiques, découverts, crédits, amendes, l’homme était acculé, ce qui l’a surement poussé à passer à l’acte contre du cash plutôt que de tuer sa famille à coup de fusil de chasse et ensuite se pendre, bref en finir avec cette VDM. Le compteur monte au fil des minutes, le dernier témoin parle d’un homme calme débitant comme Evidence ou Prodigy et orfèvre dans le franglais jeu, « le mec avait l’air super fly, genre Curtis Mayfield mais avec un flingue ». Très vite, la piste de l’exécuteur rémunéré prend place, tuer pour vivre plutôt que dealer pour survivre.

Aucun des députés tentent de huer comme à leur habitude la personne au perchoir, comme de bons élèves de premier rang, les députés absorbent les paroles de celui qui se présente comme Moi Ou Il, Qui suis-je se demande-t-il, et voilà l’homme qui débite sa multi polarité dans l’hémicycle. A l’extérieur, on est toujours sans confirmation de l’armement sous la veste. «  On a affaire à un homme bipolaire, surement armé, qui cible l’État comme responsable de sa maladie » Francis Lasouche, spécialiste bipolarité et prise d’otages sur France24. L’A.M.E. torturée de l’homme à la barre ne fait aucun doute, son discours sous forme de genèse aux antipodes de la morale établie prend à parti l’assemblée avec en fond cette question simple : être ou avoir ?

Sur Crown Heights, on est très loin du questionnement ou de la remise en cause, l’heure est à la destruction simple et nette. Ruste Juxx veut briller comme une constellation et tout brûler à 15 000 000° comme le noyau du soleil. Rien ne doit survivre, même les organismes rapologiques les plus résistants sont amenés à disparaître. Challenger hors pair, chaque bar est une météorite qui réduit encore plus les alentours en poussière. « La puissance de frappe de ce MC est aussi destructrice que celle de Thanos, on n’a pas su prévoir ce type de catastrophe, si seulement on avait commandé des hélicoptères Apache à la France… » Dick Mcfellow spécialiste Marvel et hélicoptères d’attaque pour CNN.

« On a re-visionné tous les Taxis de Besson, on connait toutes les techniques de conduite possibles, et Rémy Julienne supervise nos équipes roulant en Kangoo, on va finir par l’arrêter, on ne lâchera pas l’affaire », le Commissaire Lapiche semble sûr et certain de l’interpellation de Perso. Pour l’instant, le MC reste à l’écart des barrages de police, continuant sa ride sanglante. Le mythe se bâtit pierre par pierre et à tout moment, on s’attend à un Good Bye sous le nez des hommes en bleu. Mais si l’homme tient l’arme, alors qui tient le volant ? « On pense directement au duo de la Juste Musique Battement, qui officie depuis bon nombre d’années sur Marseille, j’ai jamais écouté mais je vous assure qu’ils sont équipés » Olivier Cachin spécialiste rap et traducteur de slang américain. Pas de pincettes à prendre sur cette information, tout ce qui est létal sur Marseille ou le reste de la France a 90% de chance de provenir des artificiers Just Music Beats. « C’est du boom bap sans être du boom bap, des fois c’est bap, des fois c’est boom mais ça nous permet pas de définir le terme boom bap » Gregory Lacive, spécialiste boom-bap chez France 3 Aquitaine. Si Perso ne s’est toujours pas fait gauler, il peut en remercier le style classieux et loin des détonations primaires habituelles que les Just Music Beats lui ont cuisiné. Perso peut manger du premier prix, mais il continue de lâcher ses bars sur de la première classe.

Sur les bancs, les cous arthosés des élus semblent se mettre en rythme, sexualité et religion, famille brisée, colonialisme, attentat et quenelle, on opine sans contester. « Ils ne savent de quel parti il est adhérent, donc de fait ils ne peuvent pas critiquer, donc ils approuvent » Marc Ladave spécialiste des comportements politiques pour M6. De l’autre côté de la porte de l’hémicycle, le GIGN s’active alors que les caméras restent braquées sur l’étrange individu au perchoir, les forces d’intervention viennent de localiser un des individus du groupe terroriste. Le nom de Phalo Pantoja raisonne. « Lui, on le connait, son style, sa touche c’est un peu Leatherface qui se ballade avec sa tronçonneuse dans un jardin d’enfants ». Phalo Pantoja est un nom qui est resté confidentiel bien trop longtemps, un talent pour les substances explosives qui n’a pas été assez pris au sérieux par les autorités, pourtant sa capacité à camoufler ses productions démontre une vraie intelligence musicale. Au premier abord, très angélique à la limite du relaxant, Phalo Pantoja arrive toujours à ajouter le grain de sable qui va faire basculer ses productions d’un cadre idyllique à une atmosphère suspecte, voire cauchemardesque.

« Y a un mec avec un masque japonais derrière lui, et dès qu’il appuie sur une touche de sa machine, y a une comète qui explose un bloc de rue et les corps en carpaccio » Steven, charcutier-traiteur de profession et observateur aguerri. Le plus Madlibien des producteurs français, l’homme qui est à la production ce que Carlos est aux attentats, semble se métamorphoser en machine de production massive. Avec 16 projets concrétisés en 5 ans, Kyo Itachi est devenu un danger aussi bien aux Etats-Unis qu’en France. Le savoir derrière Ruste Juxx c’est se remémorer la cruauté de Hard Body Hip-Hop surement son meilleur attentat. Aguerri et sans fausses notes, l’homme livre une nébuleuse de beats au boucher de Crown Heights dans la volonté de créer un trou noir qui mettrait un point final à toute contestation.

« On l’a perdu, y’a eu une alerte Samy Naceri sur le central, le mec coursait un labrador en tenue de chasseur accompagné d’une bande de roms, il était donc prioritaire de mettre à l’abri le labrador et d’abattre les roms » explique fébrilement le commissaire Lapiche suite à l’évaporation soudaine de Perso. Samy Naceri ou pas, on se doutait que Perso serait très dur à rattraper. Envolé dans la nature, il est fort à craindre qu’à sa prochaine réapparition Perso continuera à avoir cette gâchette pragmatique sans recherche d’artifice. En attendant, Jean Luc Gaudin devrait dévoiler un plan anti-RGC afin de permettre à la police municipale de contrôler tout barbecue suspect ou achat douteux de rhum de qualité.

« Suite à l’attaque du Bataclan, la DRH a intégré les interventions dans les salles comme risques psycho-sociaux, je n’allais tout de même pas envoyer mes gars avec le risque qu’ils se foutent en maladie professionnelle », argumente le directeur général de la Gendarmerie nationale en charge du GIGN alors que les médias s’étonnent qu’une bande de déséquilibrés puisse entrer et sortir sans être appréhendés. Si la tribune prise en otage par M.O.I. et Phalo Pantoja n’a certes pas fait de victimes physiques, les dommages cérébraux provoqués par les manettes de l’artificier et par le flow de l’homme aux multiples visages semblent conséquents, et laissent les députés dans un état encore plus précaire qu’à l’accoutumée. Est-ce que l’intervention de M.O.I. était là son unique testament dépeint au vitriol ? On ne sait pas, mais par contre, selon les premières rumeurs, Phalo Pantoja serait parti se réfugier aux États-Unis pour rejoindre un activiste déjà coupable de MK Ultra Operation Hypnosis en 2015, Eastkoast.

« Si Kanye West peut être qualifié d’artiste, alors je vois pas pourquoi Ruste Juxx et Kyo Itachi ne pourraient y prétendre en ayant littéralement détruit Crown Heights à coups de météorites », la réponse politique de Bill de Blasio aux attaques des Républicains qui appellent au vote Donald Trump pour en finir avec la menace Ruste Juxx ne s’est pas faite attendre, alors que le quartier de Brooklyn ne ressemble plus qu’à un terrain urbain en jachère. Afin de ne pas frustrer ce qui lui reste d’électorat dans ce district, le maire a tout de même concédé à mettre en place un public service annoucement 2 mois avant la prochaine sortie d’un disque de Ruste Juxx afin d’éviter une nouvelle hausse du taux de mortalité.

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